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12 décembre 2011 1 12 /12 /décembre /2011 20:00

 

F Fumée Noire 2

xmsdth

élicitations à tous les participants à la clôture du jour.

Je faisais, l’autre jour, référence au rabat-joie. Si je l’écris au singulier, ce n’est pas parce que je parle d’un rabat-joie en particulier, mais du phénomène en général.

Il ne faut pas confondre le rabat-joie avec le râleur, qui lui nous met généralement en joie. Le râleur se contente de grommeler sur tout et n’importe quoi, sans logique, mais sans véritable haine, juste par principe. Habitués à ce grondement sourd continuellement produit par ses cordes vocales, le râleur vous indisposera peu et ne vous agressera jamais directement.

Le rabat-joie est différent. La ou le râleur exprime juste un sentiment de mauvaise humeur qu’il éprouve surtout par habitude, la rabat-joie brûle d’une véritable haine de l’autre, qui est son moteur, sa substantifique moelle. Loin des borborygmes du râleur, qui peuvent au pire être gênants comme le chien du voisin qui aboie, le rabat-joie s’en prendra à vous, en utilisant trois armes, la culpabilisation, la provocation agressive et l’agression directe, constamment verbale, et parfois, souvent même, physique.

Le rabat-joie obéit toujours aux préceptes d’une idéologie. Il est important d’assimiler cette information pour comprendre sa logique. Ce qui fait qu’il n’est jamais satisfait.

Le râleur ne partage son avis qu’avec lui-même la plupart du temps, et, si il le fait bien volontiers partager aux autres, c’est dans un but défoulatoire plutôt que par volonté de convaincre. Parfois, il s’accordera quelques satisfactions. Prenons un exemple, très communément répandu en nos contrées : le râleur météorologiste.

Le râleur météorologiste grommellera devant la télé, contre les prévisions météo qu’il trouvera partisanes, trop clémentes pour certaines régions, (« Pfff ! En Corse, il fait toujours beau ! Ben voyons ! Ils sont payés par l’office du tourisme pour dire ça ») et trop dures pour d’autres (« Pour une fois qu’ils doivent admettre qu’il fait beau en Bretagne, elle fait exprès de se tenir devant la carte ! »). Il éprouvera de brefs sentiments de joie lorsque la présentatrice bafouillera, dira une énormité sans s’en apercevoir (Situer Marseille dans le Nord-Pas-De-Calais), voire souffrira manifestement d’une angine carabinée. Mais le râleur météorologiste est humain. Après avoir râlé pendant des années contre Alain Gillot-Pétré, une fois celui-ci trop tôt disparu, il râlera conter ses successeurs, sur le mode « Au moins, Gillot-Pétré était objectif/sympa/marrant/cultivé ») qui vaudra hommage.

Le rabat-joie, lui, n’est jamais satisfait, même lorsqu’il obtient satisfaction. « Un combat remporté n’est qu’une étape dans la lutte, et il y a tant d’autres injustices à réparer ». Parce que le rabat-joie, c’est sa principale caractéristique, n’est pas imprégné d’une opinion qu’il s’efforce de défendre de tout son cœur, il se considère comme détenteur de LA Vérité, il a une vision du monde tel qu’il DOIT être, et tout ce qui ne s’y conforme pas est, au mieux une injustice, au pire un crime.

L’exemple de saison est le rabat-joie qui milite contre Noël. Il y a une association, pas loin de chez moi, notez, je ne sais pas si elle existe toujours, mais j’avais assisté en témoin à une de leurs réunions, qu’ils tenaient dans un bistrot ou j’avais l’habitude de m’arrêter boire mon café, noir, sans sucre, parce que le sucre abîme le goût du café, beurk beurk. Si je devenais un jour un rabat-joie, ce serait pour intégrer le cercle des intégristes du café. Tiens, j’en ferai un article. Reprenons. Cette association, constituée de sept membres, avait pour objectif…

Ah, au fait : les rabat-joie peuvent se reconnaître à un indice, c’est qu’ils se regroupent en associations loi 1901, mais ils préfèrent dire ‘’collectif’’. Tous les collectifs ne sont pas des rabat-joie, mais souvent, quand même. Ce collectif, donc, se donnait pour ambition de supprimer les illuminations de Noël dans les rues. Pourquoi ? Parce que c’était indécent de dépenser autant d’argent alors qu’il y avait des mal-logés dans les rues, parce que l’électricité qu’ils consommaient contribuaient à la pollution, parce que Noël était une fête d’origine Catholique (ce qui prouve leur ignorance, mais passons) qui pouvait offenser ceux qui ne partagent pas cette foi, et que cette fête était une ode à la consommation.

(Note : à l’origine, Noël, du moins le 25 décembre, était une fête païenne. L’église, n’arrivant pas à casser cette habitude bien ancrée, y a placé arbitrairement la naissance du Christ. En réalité, d’après des historiens qui ont étudié soigneusement la chose, Jésus serait plutôt né le 4 avril. Depuis, cette fête est largement redevenue païenne, on peut dire laïque, pour faire moderne, il n’y a qu’à comparer, pour s’en rendre compte, le nombre de sapins vendus avec le nombre d’assistants à la messe de minuit)

Imaginons que nous donnions satisfaction à ces militants. Nous retirons les illuminations bariolées qui enchantent durant un mois les premiers jours de l’hiver et laissons le champ libre au ciel bas et plombé dispensant la sinistre froideur que soulignent encore les murs lépreux des rues d’où sourdent la misère et le désespoir des parents tremblants pour l’avenir de leurs enfants. Bon. Croyez vous qu’ils seront satisfaits ? Non. Le rabat-joie ne veut pas la peau des illuminations de Noël, il ne veut même pas la peau de Noël tout court, d’ailleurs, il veut tuer la joie dans le cœur des enfants.

Ce qu’il veut, ce sont de petites créatures mornes, imprégnées de culpabilité, asservie et tremblante de terreur à l’idée qu’on puisse les surprendre à manifester la moindre joie alors qu’au même moment, ailleurs, quelqu’un pourrait ne pas éprouver une euphorie similaire. L’idée des rabat-joie, c’est que, puisque tout le monde ne peut pas être heureux, faisons en sorte que tout le monde soit malheureux. Puisqu’il n’y a pas assez de sommets pour accueillir l’humanité entière, tout le monde doit ramper dans la fange.

Parmi les exemples de discours rabat-joie, on pourra relever les grands classiques. Tiens, le foie gras, c’est de saison : les gens sont des salauds, parce qu’ils mangent du foie gras à Noël, tandis que des petits enfants meurent de faim en Afrique. La même chose avec les cadeaux ? Les gens sont des salauds, parce qu’ils jouent avec des X-Box qui consomment de l’électricité alors que l’uranium des centrales empoisonne des populations entières. Le niveau de vie ? Les gens sont des salauds parce qu’à force de travail et de sacrifices, ils ont obtenu une belle situation et qu’ils ne donnent pas et que, gagnant bien leur vie, ils refusent de rester pauvres.

Tenez, comment reconnaître à coup sûr un rabat-joie ?

C’est simple. Imaginons un pays qui organise une coupe du monde de rugby. Evènement planétaire qui ne se déroule pas tous les ans, qui va réjouir des millions, pour ne pas dire, des milliards de personnes, et qui va créer un commerce. Observons diverses réactions.

« Chouette ! Allez la France, allez la France ! » sera la réaction d’un supporter enthousiaste, quoiqu’un peu optimiste.

« Oh non ! On va bouffer du rugby à toutes les sauces pendant des mois ! » sera la réaction de quelqu’un qui n’aime pas le rugby.

« Rugby… Scrognogneu… Font chier… Scrognogneu… Frimeurs… Scrognogneu… Sport de brutes… Scrognogneu… Equipe de France à chier… Scrognogneu… » et ainsi de suite. Aucun doute n’est permis : vous avez face à vous un râleur.

« Une coupe du monde de rugby ? Alors qu’il y a une guerre en Afghanistan ? Des chômeurs en Nouvelle-Zélande ? Le trou dans la couche d’ozone qui grandit ? C’est honteux, il faut immédiatement organiser la résistance contre l’organisation de cet événement indécent ! » sera, par exemple, mais j’ai oublié la faim dans le monde, les violations des droits de l’homme en Chine, les inondations je sais plus trop ou (la Corée, dans ce coin la, non ?) et ainsi de suite, le discours d’un rabat-joie.

Parce que, dans l’esprit du rabat-joie, c’est TA faute, à toi qui aime le rugby (le foot, la formule 1, le vélo, le curling…) si tous ces malheurs surviennent, et, en te réjouissant, non seulement tu montres que tu n’es pas occupé à essayer de les résoudre, mais, pire, que, durant un instant, tu oublies d’y penser, en un mot comme en cent : tu oses t’en foutre.

Alors, que faire face à un rabat-joie ? L’ignorer, tout simplement. Le désigner comme rabat-joie, expliquer non pas ce qu’il veut, mais ce qu’il est.

Parce que, si tu montres ne serait-ce qu’un signe de faiblesse, tu es foutu. Le rabat-joie sentira l’emprise qu’il commence à prendre sur toi. Il te forcera à courber l’ échine et t’embrigadera dans son combat après le lavage de cerveau nécessaire.

Le contrer ? Le rabat-joie n’écoutera pas tes arguments, il t’emmènera dans un débat dont il faussera les règles et t’accusera de ne pas les respecter, et t’empêchera de développer ton raisonnement, en déformant tes propos, ou en essayant de te décrédibiliser. Le rabat-joie atteint facilement le Point Godwin, on le reconnaît aussi à ça, et il n’hésite pas à te prêter des propos qui sont exactement l’inverse de ce que tu as dit.

Non, la meilleure solution est de s’en foutre. « Celui-la ? Laisse tomber, c’est un rabat-joie ». Dis toi que ce n’es pas ta faute, et par conséquents, pas ton problème. Non, la misère en Afrique n’est pas due à la colonisation, n’écoute pas ce que disent les médias, lis des livres sur le sujet, pourtant, pas des livres plaidoyers, mais des vrais livres, écrits par des gens sérieux et neutres faces aux faits. Non, ce n’est pas toi qui a envoyé nos soldats en Afghanistan. Non, ce n’est pas toi qui a lancé des avions contre le World Trade Center. Non, cette ethnie qui massacre une autre ethnie, ce n’est pas ta faute. Ce n’est même pas toi qui leur a vendu leurs armes. Et ainsi de suite. Tu fais l’amour tous les jours ? Et alors, c’est ta faute si ton voisin a une sale gueule et n’arrive pas à trouver une partenaire (ou un, chacun fait ce qu’il veut) ? Non ? Bon, alors ? Tu va faire abstinence par solidarité ? Ne culpabilise pas, c’est mauvais pour l’érection.

Le rabat-joie ne plaide pas pour sa conception du monde, il veut juste détruire ce qui ne cadre pas avec son projet. Dans son mode de pensée, il est totalitaire.

 

 

Les graphismes, illustrations et la déco du blog sont l'oeuvre de Manu Rayot.

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commentaires

P
<br /> et si on montait une association loi 1901 qui militerait pour la suppression des associations loi 1901?<br />
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N
<br /> si l'on suit ton raisonement tu serais jemenfoutiste !<br /> <br /> <br />  <br />
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L
<br /> J'aurai eu un qualificatif plus dur que Rabat-joie pour le profil que tu decris, mais me concernant j'ai maintenant l'impression d'etre un beau salaud <br /> (Oui, je rajoute beau, parce qu'en plus je suis narcissique !)<br />
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N
<br /> si l'on suit ton raisonement tu serais jemenfoutiste !<br /> <br /> <br />  <br />
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E
<br /> Ce que je comprends en conclusion : le rabas-joie est malheureux… très malheureux :)<br />
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